samedi 25 juin 2011

Le snobisme des perfumistas (+ mini review de La Lune 18 de D&G).

Par Phoebus.


D'après une étude trèèèèèès sérieuse sponsorisée par personne et menée par moi même, voilà ce que j'ai pu en déduire – ça vaut ce que ça vaut, dites moi si je me trompe.
Lorsqu'une personne se passionne pour la parfumerie, elle passera forcément pas les stades suivant (non, non, pas le déni, la colère, l'acceptation ect ;-p...) :

  1. D'abord, elle voudra soudain sentir tous les parfums qui lui tomberont sous la main, sans se soucier de connaitre la marque, le genre, les notes ou la réputation, pour le simple plaisir de dire j'aime ou j'aime pas.
  2. Après avoir fait le tour des Nocipharionauds, plusieurs fois, elle se renseignera sur internet pour avoir un peu de littérature sur ses chouchous.
  3. C'est ici que les choses se gâtent. L'enthousiasme communicatif de certains internautes et bloggers donnera vite envie au petit perfumista en herbe de dresser une liste (longue liste) de "parfums à tester", comprenant surtout : les Grands Classiques (qu'on zappe parce qu'on pense les connaitre), les Vieux Parfums (qu'on zappe parce qu'au début, l'innocent petit perfumista en herbe pense encore que c'est la honte de s'allonger à plat ventre pour atteindre le testeur de l'Heure Bleue), et les Nouveautés A Contre Courant (qu'on zappe parce que... Ha bon il y avait encore des étagères derrière cette immense affiche de J'adore L'Or ?!).
  4. Les goûts se forgent, on commence à distinguer les matières qu'on aime, à poser des noms sur des effets...Alors on se met à la recherche du mythe, du légendaire, du surtout très inexistant "Mon Parfum à moi Pour La Vie Qui Me Correspond <3" après s'être renseigné sur les parfums qui répondent à un listing précis de critères d'appréciation personnelle (ça fait très Meetic comme approche, isn't it ?). Et bref, assez vite, on se rend compte que l'essentiel de la parfumerie d'aujourd'hui, ça se trouve dans les maisons de niche.


Deux hypothèses ici.



Hypothèse 1) Le perfumista des champs-Elysées : (Jicky représente cette catégorie). Évoluant dans une grande ville de France, bien souvent à Paris, c'est simple, il a accès à tout. Mais trouvera quand même le moyen de se plaindre. * voix de nunuche * "Oh mon Dieu. J'ai peur. Je ne sais paaaas si j'aurai le courage de rentrer tout seul dans un stand Cartier ou Chanel, à moins de m'afficher avec le dernier sac Yves-Saint-Laurent pour ne pas me faire sortir par le gros black à l'entrée".

Hypothèse 2) Le perfumista des champs tout-court :  (je représente tous les gros frustrés de cette catégorie). Qu'il vive dans une ville de province ou dans sa campagne profonde, il n'a guère d'autre choix que de fréquenter encore et encore le séphora le plus proche. Lorsqu'on lui conseille les maisons de niche (cf "4)"), il découvre une raison de plus de dire qu'il habite dans le trou du c*l du monde. Sa réponse sera invariablement la même. * ton poli, voix de fayot* "mon Dieuuu, que ces parfums me donnent envie ! Malheureusement j'habite en province et je n'ai donc pas accès aux niches. J'espère un jour aller à Paris pour sentir ces merveilles". (ndla : faites un tour sur auparfum, vous croiserez un nombre incalculable de fois cette plainte dans des termes presque invariables).
(...Ca n'empêchera pas le perfumista des champs, entre temps, d'envoyer des mails à quasi toutes les maisons de parfumeurs pour tenter d'obtenir des échantillons gratos...)


Tout ceci pour quoi. Pour constater qu'il existe une cinquième période, plus ou moins longue selon les individus, durant laquelle le perfumista en herbe devient carrément snob. Snob parce qu'il ne jure que par les niches et dénigre le mainstream, snob parce qu'il PENSE avoir fait le tour de la parfumerie, snob parcequ'il commence limite instinctivement à poser un regard très (trop) critique sur les nouveautés. On pourrait comparer cette période à la très gonflante et très tête-à-claque période de la pré-adolescence (en effet, qui n'a jamais eu des envies de meurtre face à la vanité/l'impertinence/le trop-plein-de-confiance-en-soi qui suinte d'une conversation avec un môme de douze ans, je vous le demande ?).




Personnellement je pense être enfin sortit de cette période ridicule depuis peu (pour poursuivre avec l'équivalent de l'adolescence : une curiosité renouvelée me donne envie de tâtonner un peu tout n'importe quoi en parfumerie, mais je sens bien que mon regard est plus lucide et peut-être plus sincère qu'avant).
La meilleure manifestation de cette évolution, c'est la faculté à ne pas bouder son plaisir. Et en particulier le plaisir qu'on peut trouver dans le mainstream, souvent à petit prix. J'ai redécouvert récemment La Lune 18 de D&G (en ouvrant les derniers cartons de déménagement, presque neufs mois après avoir changé d'appart', no coment...). C'était l'un de mes premiers "parfums préférés" quand j'étais encore dans la phase "1)" * soupir nostalgique *. Je l'adorais. Je l'ai rapidement oublié parce qu'il y avait telllllllllllement mieux que D&G ailleurs... Bah oui, le muguet de La Lune était tellement pâlichon à côté du naturel de Diorissimo. Et cette pomme, tellement paic vaisselle face à l'éclatante granny smith de Light Blue. Quand à la tubéreuse... Totalement inexistante et insipide face à la championne du genre, Carnal Flower !
Vous l'aurez compris, la phase "4)", celle où on est tellement content de savoir reconnaitre les matières utilisées et de les comparer est réellement dangereuse car à force d'intellectualiser systématiquement ce qu'on sent, on éloigne ce qui nous touche. 



Aujourd'hui donc, je peux redécouvrir pourquoi la Lune m'a touché, tout en ayant pleinement conscience que la qualité des matières utilisées vole à raz-les-pâquerettes (Procter&Gamble oblige ?). Je peux également dire que je m'en fiche pas mal. Parce que l'équilibre et l'émotion sont là (pour moi). Et c'est tout bête. J'aime la Lune parce que ça sent les bulles. Les bulles de savon qu'on souffle quand on est enfant, qu'on obtient en mélangeant du paic vaisselle et de l'eau. Les notes de tête ont une dimension un peu plus "champagne", les notes de cœur un peu plus "floral blanc" et les notes de fond un peu plus miellées, mais du début à la fin, La Lune laisse des bulles d'enfance dans votre sillage.






Et vous alors, cher lecteur ? Votre petite envie mainstream "pas prise de tête" du moment, qu'est-ce donc ?

11 commentaires:

  1. Docteur, très bien vu sauf que je vais vous parler d'un temps...
    Est-ce que tu te rends compte du drame social, du terrible isolement, que c'était d'aimer le parfum AVANT internet? Quand il n'y avait RIEN que votre beauté et Marie-Claire qui faisaient des spécial parfum en novembre (pour Nowell) et en avril (fête de môman + eaux d'été)? Que tu voyais mentionné des noms comme Goutal mais sans l'adresse ni rien et que tu devais te contenter de fantasmé méchamment le parfum mentionné dans l'article en espérant tomber sur une boutique un jour...
    Fantasmes Mainstream du moment: N°19, Infusion d'Iris et Amande Persane. Et j'ai re-senti Paris et je le trouve toujours vachement séduisant...

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  2. Il y a encore période où l'on se rend compte que l'on est pas complètement dingue quand quelqu'un d'autre que vous défend aussi la cinquième période que tu évoques. J'ai toujours regarder La Lune avec le recul que ce parfum mérite, et je te remercie de lui reconnaitre quelques qualités que je défends depuis le début. Jicky, ta jeunesse est tes mots font du bien et je te remercie pour la fraîcheur de ton regard.

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  3. Bonjour Phoebus et très bel article ;-)

    Je pense avoir plus ou moins zappé toutes les phases et être arrivée tout de suite à la cinquième. Je suis toujours enthousiaste quand je pars à la découverte de belles senteurs et je ne crains pas le beau synthétique qui, s'il me parle, me fait rêver, me charme et me donne des émotions, fera partie de ma liste senteurs que j'aime sans condition, sans me poser de questions.

    Je suis plus intuitive que réfléchie quand un univers me passionne. J'aime sentir le parfum pour ce qu'il est, dans son ensemble. Puis, si deux semaines plus tard, je l'ai toujours en mémoire, c'est qu'il a sa place dans mes favoris. Ensuite, je le teste plus amplement pour le décortiquer et chercher qu'elle est cette matière, cette famille, cet équilibre,... qui me font de l'oeil.

    Eh, oui, ça fait 20 ans que j'ai trouvé MON parfum, donc celui-là, je ne le cherche plus mais je trépigne de joie quand je lui ramène un nouveau compagnon de jeu. ^_^

    Alors, mon beau synthétique du moment, sans prétention, pas prise de tête, facile à porter, qui n'a pas une bonne tenue, ni un sillage incroyable, c'est... Clair de Rose, de la collection des Contes Bucoliques, des parfums BERDOUES. C'est d'abord le flacon qui m'a fait de l'oeil, puis j'ai testé sur peau toute la gamme (même pas peur !^^), et voilà, séduite par la rose cheap, mais qui ne fait pas désodorisant wc à mon nez ! ;-)

    Bon week end parfumé à la Lune 18 de D&G
    Bises, Vivi

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  4. Bonjour, bonjour ! Quel article intéressant, merci Phoebus !

    Personnellement, je n'ai pas développé tous ces symptomes, hormis le stade 2 et le fait d'être une parfumista des champs, mon parcours est quand même différent.

    Je ne cherche plus le "parfum charmant", j'ai fait semblant un temps, avant d'admettre (ouf !) que j'étais passionnée et boulimique et plutôt pour la polygamie parfumesque (expression empruntée à Géraldine, avec mes excuses).

    Je rampe à quatre pattes dans les Nocisépho depuis très longtemps - bien avant d'avoir découvert les blogs de parfums - mais je me relève aussi parfois, pour mon plus grand plaisir et pas seulement parce que j'ai des problèmes de rotules...

    Je suis ravie d'avoir découvert les parfums de niche grâce aux blogs mais je trouve plein de belles choses à sentir et adopter dans le mainstream et je ne m'en prive pas.

    Mes derniers achats au Séphora, Infusion d'Iris en edp, Summer by Kenzo et N°5 Eau Première. Et je suis impatiente de découvrir le nouveau N° 19.

    Désolée pour la longueur du post et encore merci pour ce billet sympatique !

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  5. Perfumista (encore ça c'est pas trop grave) et sympathique c'est mieux. Dommage que j'ai loupé l'heure de la sieste...

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  6. Jicky, sisi, représente perfumista des Champs-Elysées, yuzuuuuu man !!!

    Tu oublies le côté tragique du métro : bloqué, grêve, billets, correspondances, adresses, lignes... C'est assez horrible niveau olfactif aussi !

    En période j'ai fait juste 2 et 4. Là je suis en mode je sens tout, sans prétention de niche ou de mainstream (quand le dernier Van Cleef et 20 fois mieux que le dernier Kilian...)

    Et Méchant Loup : c'est Phoebus qu'a écrit celui là ! Mais merci quand même ^^

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  7. cet article décrit assez bien l'évolution d'un perfumista. moi aussi je pense être sortie de la phase où l'on a envie de tout sentir et tout acheter et où l'on devient limite snob pour se concentrer sur le vrai plaisir, sur le parfum en général (et oui, plus on sent, plus on apprend, plus on a encore envie d'apprendre)... C'est comparable un peu à l'évolution d'une historie d'amour, au début on est complètement emporté et aveuglé par sa passion, puis cela s'assagit et c'est alors un amour plus mur et plus sage des parfums qui arrive. C'est amusant.

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  8. Eh bien,moi,je suis toujours aussi boulimique! Un mainstream? 24, Faubourg d'Hermès.Un pas cher? Cléa d'Yves Rocher qui me plaît beaucoup (il est sorti quand j'étais en terminale,alors évidemment...)Mais ce ne sont que des exemples!C'est vrai que j'ai eu une période "cérébrale", mais maintenant, je recherche avant tout le bien être,le confort, le rêve . Et le rêve accessible,ça existe aussi!

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  9. Brillant :)

    Je me sens plutôt en phase 17 1/2 et oui, heureusement qu'il reste des bonnes surprises parfois, en mainstream, sinon, j'aurai vite tout abandonné ...

    bonne journée !

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  10. Excellent article, vraiment ! Je pense que l'on a tous souri en se sentant un peu "coupables" d'être mis à nu de la sorte ! :)

    Mon envie mainstream du moment c'est le parfum éponyme de Stella MacCartney ou Rose Essentielle de Bvlgari...

    Bonne soirée !

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  11. Merci tout le monde !
    Oui bon c'est sûr que le processus ne s'arrête pas après le 5 (Jeanne doit au moins être au stade 42 !) et que l'évolution continue sans cesse ensuite. Mais je suis certain que la majorité de la population ne dépasse pas le stade 1 alors... Oo
    Mûre, vous me donnez envie de sentir la rose de Stella, mais je ne la trouve nul part ! :(

    Phoebus.

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