jeudi 12 juillet 2012

Onda Eau de Parfum - Vero Profumo : Showtime !

Si l’inspiration initiale d’Angel se situe dans une fête foraine, rares sont les diverses évocations du monde du carnaval en parfumerie. Au diable la barbe à papa et autres joies de la poutine québécoise, l’idée du carnaval se fait avant tout par les symboles.



Le carnaval, la fête foraine ou l’univers du cirque est le monde de la déformation et de l’enfance. Ces deux thèmes se confondent et se répondent tour à tour dans une sorte de manège si fluide que tout semble naturel. Les traits sont déformés, comme l’illustrent le jeu des miroirs ou les yeux des clowns très géométriques (sous forme de traits voire d’étoiles). De plus, les contours de la bouche sont repeints et le nez se fait soit très voyant, soit il est complètement dissimulé. En un mot, cette déformation augmente les sens, et par conséquent les perceptions. Cette modification entraine dès lors un changement de comportement : ce qui auparavant était manifeste et ridicule fait désormais parti de la norme. Rayures, masques, formes géométriques simples : tous les éléments du carnaval et de la fête foraine sont ramenés à un divertissement que les plus jeunes vont vivre pleinement, et que les plus grands vont retrouver à coups de cris et d’expériences de déformation.

Beetlejuice

L’expérience d’Onda en extrait est déjà un grand huit olfactif en soi. Sûrement un jour j’aurais l’occasion d’en reparler ici ou ailleurs, mais c’est face à l’eau de parfum que je décide de faire chapeau bas aujourd’hui : une eau de parfum carnavalesque créée par l’incroyable Véro Kern !
Pour entamer cette fête masquée, deux écrans monochromatiques légèrement rugueux sont projetés au nez : un jaune dont on ne saurait dire s’il était éclatant au temps jadis ou s’il a conservé une pâleur maladive au fil des siècles ; un vert amer, pas criard mais presque, ce que nos amis les romains désignaient par « prasinus ». De ces deux tonalités majeures, le carnaval d’Onda en a fait un système de rayures harmonieux et enjoué, aux matières brutes et déformées, maîtrisé par une poigne de fer.

Onda
Eau de Parfum
Alors qu’au loin jouent des cuivres et des mélodies, on sent la bannière bariolée se mouvoir petit à petit, avec une beauté sans concept, touchant simplement et avec brio la corde de l’âge tendre. Le tout demeure dans une harmonie orchestrale. De la déformation des couleurs et des matières initiales nous arrivons à l’enfance, notamment en communiquant la joie du déguisement, ce déguisement carnavalesque permettant de fêter en quelque sorte une nouvelle facette cachée en nous.
Onda profite ainsi du tumulte de départ pour faire partir une petite procession de fruits, d’épices et de fleurs en tête d’une marche costumée. A vrai dire, Onda crée une nouvelle forme olfactive complétement déformée par rapport à la plupart des insipides jus du commerce si fades et si vulgaires, définissant ainsi une nouvelle norme. Les notes très sales du fond de l'eau de parfum deviennent magiques, sourdes comme des rires de clowns cruels, mais exaltants pour l'enfant amateur de sensations qui est en nous.

Et c'est d'ailleurs ce fond, ces ultimes notes, ces derniers gens du défilé qui donnent la complexité et la grandeur d'Onda. Ses dernières notes sont des sortes de fantômes de gens qui ne concernent que nous, que nous sommes les seuls à voir, qui nous racontent une histoire qui transformera seulement notre personne. En ce sens, l'amateur d'Onda - le perfumista - est le marginal qui voit ces fantômes qui défilent à la toute fin du carnaval orchestré par Véro Kern. Des fantômes qui ne font pas peur, non, mais des fantômes qui sont là pour réveiller ces histoires enfouies en nous et qui ont façonné notre enfance à travers des dessins et des gribouillis dans les cahiers. Les musiques festives des fêtes foraines et des manèges revivent à travers eux dans un éclat lumineux et intense, décuplant nos sens et notre manière de sentir, de penser.

Et face aux gens qui crieront "C'est quoi ce cirque ?", contentez-vous simplement de rigoler.
J.